Non, le Tarot de Marseille ne vient pas de Marseille (Désolé pour la désillusion !)

Vous pensiez que le Tarot de Marseille était né dans la cité phocéenne, entre deux parties de pétanque et un verre de pastis ? Eh bien, préparez-vous à une petite secousse : ce tarot, aussi emblématique soit-il, n’a de marseillais que le nom (ou presque). Entre influences italiennes, artistes parisiens et imprimeurs lyonnais, son histoire est une véritable odyssée. Allez, on remonte le fil du destin de ces cartes mystérieuses !

Un jeu divinatoire… qui n’a rien de local

C’est l’un des tarots les plus célèbres en Europe, un incontournable de la cartomancie, et pourtant, son lien avec Marseille est bien plus mince qu’on ne l’imagine. Si les Anglo-Saxons préfèrent le Rider-Waite Smith avec ses illustrations inspirées de l’Art déco, en France, on reste fidèles au Tarot de Marseille. Mais surprise : celui que nous connaissons aujourd’hui est loin d’être une invention provençale.

Oubliez les cigales et le Vieux-Port, son histoire commence ailleurs. En réalité, la version du Tarot de Marseille que nous utilisons a été rééditée en 1920 par Grimaud, mais avant ça, il avait déjà bien voyagé.

Un profil Tinder bien rempli : entre Paris, Lyon et l’Italie

Si le Tarot de Marseille avait une bio sur une application de rencontre, il écrirait sûrement :
👉 « 100 % accent marseillais, un peu de Lyon et de Paris, avec un grand cœur italien ».

Car oui, avant de poser ses valises à Marseille, ce jeu avait déjà bourlingué. On remonte le fil du destin jusqu’au XVIIe siècle, où Jean Noblet, un maître cartier parisien, dessine l’un des premiers modèles connus du tarot que nous utilisons aujourd’hui. Ce jeu, qui porte encore des influences médiévales, est l’une des versions les plus anciennes du Tarot dit « de Marseille », même s’il a vu le jour bien loin des bords de la Méditerranée.

Mais Noblet n’est pas le seul à façonner cette mystérieuse iconographie. Lyon, à l’époque, est également un grand centre d’impression et de fabrication de cartes à jouer. De nombreux maîtres cartiers y travaillent, perfectionnant et enrichissant les illustrations des tarots, leur donnant peu à peu cette esthétique symbolique qui nous est aujourd’hui si familière. Il semblerait donc que le Tarot de Marseille soit aussi un peu lyonnais, un peu parisien… et même, pourquoi pas, un brin vagabond.

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Un cœur italien qui bat sous les cartes

Et l’Italie dans tout ça ? Elle est au tout début de l’histoire. Bien avant que Marseille ne devienne un haut lieu de production de cartes à jouer, les premiers tarots étaient de véritables objets d’art, luxueusement peints à la main, et réservés à une élite. On en retrouve des traces dès le XVe siècle, dans les cours princières italiennes, notamment auprès des Visconti-Sforza, l’une des familles les plus influentes du duché de Milan. Leur tarot, richement décoré de feuilles d’or et de symboles ésotériques, témoigne de l’importance que ces cartes revêtaient à l’époque : non pas un simple jeu, mais un véritable outil de prestige et de réflexion spirituelle.

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Mais l’influence italienne ne s’arrête pas aux salons de la noblesse. Les communautés tziganes, grandes voyageuses, jouent également un rôle clé dans la diffusion et la transformation du tarot. Pour ces populations nomades, le tarot devient bien plus qu’un simple amusement : il devient un outil de transmission, un moyen de raconter des histoires, de comprendre le monde et d’interpréter les signes du destin. Ce n’est donc pas un hasard si le Tarot de Marseille, avec son langage symbolique universel, a su traverser les siècles et les frontières.

D’Italie à la France, de Paris à Lyon, avant de poser ses valises à Marseille, le tarot a suivi un chemin sinueux, nourri de multiples influences. Son nom, finalement, est presque un malentendu : il ne vient pas d’un seul endroit, mais bien de plusieurs cultures entremêlées. Et c’est peut-être là que réside toute sa force.

Mais alors, pourquoi « de Marseille » ?

Si le tarot est né ailleurs et s’est nourri d’influences multiples, pourquoi lui avoir attribué le nom de Marseille ? Tout est une question de diffusion et de fabrication.

À partir du XVIIe siècle, Marseille devient le centre névralgique de la production de cartes à jouer. La ville, qui était déjà un carrefour commercial majeur, voit ses imprimeurs s’imposer comme les principaux fabricants de tarots en France. Grâce aux avancées de l’imprimerie et à un véritable savoir-faire local, la production se standardise, et c’est dans les ateliers marseillais que le tarot prend peu à peu la forme qu’on lui connaît aujourd’hui.

Mais attention, il n’existe pas un seul Tarot de Marseille, mais bien plusieurs. Chaque artisan apporte sa propre touche, modifiant parfois les couleurs, les détails des figures ou l’agencement des symboles. Pendant longtemps, le tarot reste un objet évolutif, influencé par ceux qui le dessinent et l’impriment.

Ce n’est qu’au XXe siècle, avec le retour en force de l’ésotérisme, que le Tarot de Marseille moderne se fige dans une version bien précise. Ce renouveau est notamment porté par Paul Marteau, directeur des éditions Grimaud, qui en 1930 publie une version « définitive » du Tarot de Marseille, celle que nous connaissons encore aujourd’hui. C’est cette version qui devient le modèle de référence, figé dans ses couleurs et son iconographie.

Alors, le Tarot de Marseille… Marseillais ou pas ?

Au final, que retenir de cette histoire ? Le Tarot de Marseille est-il vraiment marseillais ? Pas vraiment. Son nom est davantage un hommage à la ville qui l’a popularisé qu’une véritable indication de son origine. D’Italie à Paris, en passant par Lyon, il s’est enrichi d’influences diverses avant de trouver, dans les imprimeries marseillaises du XVIIe siècle, son véritable tremplin vers la postérité.

Mais après tout, est-ce vraiment important ? Le tarot est avant tout un miroir du monde, un jeu qui traverse les époques et les cultures sans jamais perdre de son mystère. Qu’il soit de Marseille, de Milan ou d’ailleurs, l’essentiel est qu’il continue de fasciner, d’intriguer et d’accompagner ceux qui cherchent à mieux comprendre leur destinée.

Alors, peu importe son passeport, l’important, c’est ce qu’il vous révèle quand vous le tirez. 😉